[TIMELESS] Beau Diable

Un, deux, trois, bois. Un, deux, trois, bois.

Ça faisait quoi, là ? Trop. Oui, trop de verres déjà qui s'alignaient, renversés sur la planchette en bois devant lui. C'était pas gros, ça. C'était que des shooters. Mais c'était plus fort que ce que les autres sifflaient autour. Leo posait un regard demi-clos sur les visages hilares, les silhouettes dansantes, et malgré qu'il soit à l'origine de cette fête, lui, il n'avait plus du tout envie de rigoler. Un soupire. Attrape un verre. Le vide. Le retourne sur la planche. Pourquoi il continuait ? Il savait bien que c'était ça qui le rendait sombre. L'alcool, il l'avait mauvais. Triste. Lourd. Il le savait. Pour fêter un diplôme, un retour, des retrouvailles... Quelle idée d'avoir bu autant. Oui mais voilà, il faisait bien comme ça lui chantait, non ? Et il lui chantait de boire. Donc...

Un, deux, trois, bois. Un, deux, trois, bois.

Le dernier verre de la ligne était retourné. D'un geste assez vague de la main, il poussa la planchette qui claqua contre les deux autres qui étaient déjà sur la table. Il n'avait plus rien à boire, c'était pas bien ça. Alors il attrapa sa veste posée sur le tabouret à côté, et se dirigea directement vers le bar. Il fallait zigzaguer entre les gens, donner du "merci" et du "tout se passe bien ?" entre deux félicitations pour son diplôme. Il fallait tourner la tête, et la retourner, et encore et encore, si bien qu'il ne savait plus s'il avançait ou reculait, ou même s'il était parfaitement immobile. C'était les gens... Ou c'était l'alcool ? Un peu les deux, et Leo, il voulait juste atteindre le bar. Il voulait... Il voulait... Il y était. Sa main s'abattit un peu trop fort sur le bois ciré, et il se hissa sur le fauteuil haut. Posa sa veste en travers du comptoir. Voilà qui était mieux. Un soupire. On se redresse. Sa main fila fouiller la poche où était son étuis à cigarettes, et son porte-feuille. Il fit tourner entre ses doigts le petit loquet argenté qui maintenait fermée la boîte, l'ouvrit, attrapa une clope qu'il emmena à sa bouche, et laissa pendre à ses lèvres le temps de refermer le boitier et de le reglisser dans sa poche. Alors seulement il releva la tête pour chercher le barman des yeux.

C'était un garçon qui était vraisemblablement bien plus jeune que Leo. Torchon en main, il essuyait avec une rapidité et un efficacité déconcertante des verres qui semblaient tout droit sortis de la machine avant de les pendre au-dessus du bar. Son regard sombre semblait se perdre dans la foule sans la regarder. Est-ce que c'était du professionnalisme, ou est-ce qu'il était blasé par l'effervescence ? Par l'excès qui avait enflammé le bar ce soir. Quoi qu'il en soit, ce petit air concentré avait quelque chose de séduisant qui tira un sourire à Leo. Rapidement, il récupéra sa cigarette pour se la glisser sur l'oreille. C'était peut-être un peu par envie de retrouver le sourire, peut-être beaucoup à cause de l'alcool qui lui faisait complètement oublier le peu de manières qu'il avait, qui poussèrent Leo a héler le garçon, d'une manière assez peu habituelle pour commender un verre... (Ou peut-être bien trop habituelle, malheureusement)

- Hé ! Je veux surtout pas sembler essayer de t'impressionner mais... Regard accroché a celui du garçon - le pauvre semblait déjà désespéré, ou c'était peut-être juste une impression - Leo se pencha doucement par dessus le bar comme préparé à dire un secret. ... Je suis Batman !

Large sourire, clin d'oeil, et voilà le parfait package du dragueur bourré. Ouais, mais au moins, il avait retrouvé le sourire ! Et c'était le principal, non ?

Bingo ! Il avait remporté un sourire avec sa vanne fumeuse... C'était pourtant pas sa meilleure approche, et vu son état d'ébriété, la conversation qui allait suivre ne finirait certainement pas entière dans sa mémoire du lendemain, mais enfin ce n'était pas une raison pour s'arrêter en si bon chemin ! Alors comme ça, le barman avait le même humour discutable que Leo ? En voila une glorieuse nouvelle. Cependant son large sourire s'était changé en une moue -adorable sisi- alors que le blond se laissait retomber dans son assise.

- Vous ? Ah non, non, je suis pas si vieux que ça... Faut me tutoyer, hein.

Et si ça le gênait, le gars ? Oh ben ça, ça lui passait au-dessus à Leo. Mais c'était ça, le truc, il aimait pas que le temps passe, et ce "vous", ça lui donnait un coup de vieux. Ah vous dites ? C'est de la politesse ? Non mais ça, l'alcool s'en chargeait. Et puis qui l'eut-cru, malgré tout son pognon, monsieur Leroy n'avait pas vraiment ce qu'on pouvait appelé la tchatche bourgeoise, oh que non. Les politesses à s'enfariner le museau, c'était pas vraiment son style, plutôt du genre à choquer qu'à bien se tenir... Alors donc, ce "vous", il en voulait pas. En revanche, quelque chose à boire, ça oui, il voulait !

- Et ouais, à la base je venais pour reprendre une tournée de ces petites merveilles, là - il avait désigné une planchette à shots abandonnée plus loins sur le bar -
mais entre temps je me suis perdu dans tes yeux...

Et vas-y que je te fais un clin d'oeil, encore. Non mais c'était lourd, faut l'avouer. Mais un peu mignon ? Un peu. La tentative l'était, du moins. On pouvait pas lui en vouloir d'avoir trop bu, si ? Si. Mais chut, on le dira pas. Ses coudes posés sur le bar, Leo avait croisé ses doigts et posé son menton dessus.

La remarque tira un sourire a Leo. Un sourire tendre, léger, pas forcé. Ce genre de sourire qui vient s'incruster sur un visage alors qu'on y pense pas, qui est juste là et qui trahit ce qu'on pense, au fond. Vrai : il n'était pas allé chercher très loins cette approche. Cela dit, imbibé d'alcool, c'était déjà bien qu'il aligne des mots pour faire des phrases correctes ! Et l'exercice allait se corser, puisqu'il allait maintenant partir pour une... un, deux, trois, cinq, huit... neuvième tournée de shots. D'ailleurs, il allait peut être falloir songer à payer l'addition. La réservation de la salle, ça avait été réglé depuis un moment, mais les boissons c'était maintenant. Un regard sur les invités. Mh. Ouais, ça buvait encore pas mal, alors mieux valait attendre la fin pour sortir la carte. Sinon il allait falloir payer deux fois, et ce serait ennuyant.

- Je ne prétend pas faire original, et si tu me trouves mignon, c'est que mon effet est réussi, non ? Pour les shots, mets en six, ce sera déjà bien ! Vodka s'il te plait.

Son regard glissait sur le brun devant lui. Il aurait pu être plus discret, ou plus élégant. Oui, il aurait pu. Mais il n'en prenait pas la peine. Après tout, il avait l'excuse de l'alcool. Si, si, c'était une bonne excuse, elle marchait pour plein de trucs. Et notamment pour la drague lourde, et le mattage intempestif et éhonté. Regardant, donc, le bel éphèbe -sisi- servir les verres, il songea qu'il n'avait pas fait les présentations. Qu'à cela ne tienne, ses mains se décrochèrent l'une de l'autre, et il attrapa une de ses cartes de visite dans son porte-feuilles. C'était un petit rectangle crème, marqué d'une fine bordure dorée. En haut au centre, son nom complet dans une police sobre mais assez large. En dessous, il y avait en italique : Journaliste pour le Bristol-Cove Afternoon, qui était un petit journal local. Et au dos, le plus important. Son numéro de portable. Pas franchement conscient d'être intrusif, ou simplement parce qu'il se foutait complètement de l'être, il se pencha à nouveau par dessus le bar, pour glisser la carte dans la petite poche qui ornait le T-shirt du brun, avant de se rassoir correctement.

- Au fait, je m'appelle Leo. Mais toi, tu peux m'appeler ce soir... il lança, esquissant un sourire en coin.

Encore un sourire. Mais c'était la soirée de la répartie ou bien ? Plus persévérant, hein. Oh mais Leo n'avait pas dit son dernier mot. Il n'insistait pas plus surtout par politesse (comment ça c'est pas son genre, chut). C'est qu'il savait bien qu'il avait trop bu, et qu'il oublierait la moitié de cette conversation. Alors il préférait rester... Disons correcte. Draguer lourdement, oui, mais jouer les parfaits connards... Oh remarque, ça lui arrivait bien aussi des fois. Mais pas avec un gamin. Oups, voilà, il l'avait pensé : gamin. Non mais fallait le voir, le brun, avec ses airs de jeune premier ! Il avait quoi ? Dix-huit ans ? Tout juste adulte, c'était a parier. Un regard plus bas. Trop bas. Est-ce qu'il avait déjà... STOP ! On remonte les yeux, monsieur Leroy. Le sourire sur ses lèvres s'était un peu agrandi. Comment ça, il était surement hétéro ? Ha mais non, il se laissait draguer alors forcément... Forcément Leo y voyait une chance de ne pas rentrer tout seul. Non vraiment, il ferait mieux de ne pas les boire, ces shooters. Il était bien assez chaud comme ça, déjà. Comme il avait un beau sourire...

Il ne lui avait pas relancé sa carte à la figure. Non, il avait même sourit. Et enchainé sur une question. Une bonne, d'ailleurs, car dans l'optique où Leo aurait dû quitter le bar pour rejoindre une table avec le plateau dans les mains... Non, vraiment, ça n'aurait pas été une bonne idée. Mais maintenant qu'il les avait devant lui, ses verres, il n'avait plus envie de les boire. Non, maintenant, ce qu'il voulait, c'était obtenir le prénom de son barman. Un regard à l'horloge au mur. La soirée n'était pas encore terminée... Mais Leo voulait renvoyer tout le monde à la maison. Juste comme ça, par caprice, pour avoir du silence, et un moment seul pour discuter. Discuter ? Chut, on a dit discuter. Avec un petit rire pour accueillir la question du brun, Leo se redressa un peu plus sur sa chaise.

- Honnêtement, si j'essaye de porter ça, je vais en foutre partout et j'aurais l'air encore plus ridicule que ce que je ne suis déjà, et comme je suis Batman, tu comprends... J'ai une réputation a tenir. Il mima une fausse grimace, comme s'il devait vraiment défendre une image de marque... Avant de retrouver un sourire amusé, tout en attrapant l'un des shooter, pour le vider d'un trait, et le retourner sur le plateau. Attendez, il n'avait pas dit qu'il passait à l'eau ? Oh, après tout, c'était transparent pareil.

- Tu me sers un verre d'eau s'il te plait ? Un grand. Faudrait que j'élimine un peu le taux d'alcool dans mon sang si je veux tenir une vrai conversation avec toi...

Un gentil sourire, il attrapa la cigarette sur son oreille pour la ramener à ses lèvres. Juste une seconde, et voila qu'il la récupérait déjà pour la faire tourner entre ses doigts, et posait un regard plus sérieux sur le jeune homme.

- Est-ce que je peux espérer connaître ton prénom avant la fin de la soirée, ou je vais devoir me contenter de t'appeler chéri ?

Retour de la clope aux lèvres, et sa main fila à sa poche arrière pour récupérer son briquet. Qu'il posa devant lui. Avant de poser également la cigarette. Et de vider un second shooter. Il allait falloir plus d'un verre d'eau pour éliminer tout ça...

Oups. Ce barman était bien trop gentil, et voilà qu'il se proposer de lui emmener les verres. Les emmener où ? Il en avait déjà bu deux. Et puis il était bien, là, au bar. Il devait vraiment bouger ? Ah mais non, pour le moment il voulait rester là ! Et d'ailleurs, il attrapa rapidement le verre d'eau qui venait de lui être servi. Une gorgée, deux gorgées. Poser. Un regard sur les gateaux apéro, et un sourire à la réflection du brun. Docile, il s'exécuta, attrapant deux biscuits pour les glisser entre ses dents. Vomir, c'était pas au programme, et de toute manière, il n'était pas assez mal pour ça. Une nouvelle gorgée d'eau. Un nouveau sourire, suivit d'un rire franc alors que, enfin, le barman se présente, non sans une note d'humour. C'était donc Evan. Simple, et élégant. Ça lui allait très bien. Mais parce que c'était drôle, et puisqu'il en avait reçu l'autorisation, il décida que pour lui ce serait chéri. La réflection sur la cigarette fit hausser un sourcil à Leo. C'est vrai qu'il aurait pu demander, mais il n'avait pas franchement réfléchi. Soit, il ne fumerait pas ici. Rapidement, il reglissa la clope à son oreille, et rangea son briquet dans sa poche.

- Alors je fumerais plus tard. Je n'ai pas envie d'aller dehors alors que je suis en si charmante compagnie... n'est-ce pas, chéri ? Sourire. - Pour les shots t'emmerde pas, je vais rester ici. En fait...

Une idée. Pas très bonne. Mais une idée quand même. Et voilà qu'il fait un truc dangereux, le Leo. Le voyez-vous, qui grimpe sur son tabouret - oh que c'est pas stable - et puis qui se retrouve debout sur le bar ? Ben voilà... Et attention à pas renverser les shooters !

- Hé, tout le monde ! Les amis... Alors que les visages se tournaient sur le blond, hôte pour la soirée, et que les voix se taisaient doucement, Leo joignit ses deux mains, comme préparé a donner un discours. - Mes amis, je vous remercie tous d'être venus ce soir ! Revenir à Bristol Cove... Et vous retrouver tous... Ça me touche énormément ! Cette soirée a tellement bien commencé, que je vous propose à tous de finir par un after à la maison !

Des applaudissements, des éclats de voix, des rires et des cris. L'idée fonctionne ! Et voilà que Leo redescendait de son perchoir, glissant un clin d'oeil à Evan au passage. Là, il attrapa le bras d'une petite brune qui semblait vouloir se noyer dans son diabolo grenadine, et après les avoir récupérer dans la poche de sa veste, lui colla les clefs de la villa dans les mains.

- Tiens, tu ouvriras ! Faites comme chez vous. Il lui souffla à l'oreille. La brune s'empourpra, mais acquiesça avant de s'éloigner. Cela fait, Leo se retourna vers le bar, un immense sourire étirant ses lèvres. Doucement, la salle se désengorgeait, et bientôt il serait tranquille. Ils seraient tranquilles. Leo était fier de son idée. Et voilà le travail... On en était où ? Ah oui. Tu me disais de pas fumer ici. Puisque j'avais loué la salle pour la soirée, et que je viens de virer tout le monde, je suppose que ça signifie que t'as finis ta journée... Ça te dit de venir à l'after ?

Et donc le ménage... La caisse - d'ailleurs faudrait songer à payer -, la clôture... Non, ça Leo n'y pensait pas. Ni même à la simple possibilité que son "chéri" du jour, enfin du soir, soit tout bonnement attendu chez lui.

Il avait pas répondu de suite, Leo, à sa petite pique de drague. Non, avant il avait fait attention à virer tout le monde à coup de speech debout sur le bar. Une sortie grandiose, oui monsieur ! Puis après encouragé qu'il était par le comportement du jeune homme, il avait carrément décider de l'inviter à la Villa. Comme tous les autres en fait. Oui mais, ce qu'il n'avait dit à personne, c'est que papa et maman Leroy étaient à la maison. Et que l'arrivée du troupeau n'allait certainement pas leur faire plaisir ! La cohue serait mise à la porte en une seconde, et Leo aurait Evan pour lui tout seul... Un piège dites vous ? Leo voyait plutôt ça comme une manière de forcer le destin.

Et voilà que le brun avait accepté. Evidemment. Formidable. Hallelujah. Leo affichait un sourire ravi, alors qu'à l'évocation du paiement il tirait une American Express Platinium de son porte-feuilles pour la tendre au brun, sans même demander le montant de la note. De l'esbroufe ? Ah mais oui, complètement. Il sortait le grand jeu histoire d'impressionner, mais la vérité c'était que ce n'était qu'un bout de métal, et que les sous c'était ceux des parents... Mais bon, c'était bien son nom à lui qui était gravé sur l'amex. Si, si. Lennard Oska Leroy. Trop long. Trop pompeux. Il préférait juste "Leo".

- Tiens, pas besoin de code c'est une American Express. Et t'en fais pas. J'ai un chauffeur.

Sourire satisfait. Ben oui, évidemment qu'il avait un chauffeur. Pourquoi pas des gardes du corps aussi ? Mais pourtant, c'était vrai. Dehors, il y avait un type en costume qui attendait. Il n'y avait qu'à décider de filer. Puis comme il avait dit, ses collègues pourraient bien finir, hein. Avec ce qu'il laissait comme pognon ce soir à la boîte, s'il voulait partir avec le barman, il avait bien le droit ! Comment ça on achète pas les gens ? Chut.

Le paiement effectué, Leo avait rangé la carte bien à sa place. Il ne fallait pas la perdre, hein. Son regard resta ensuite fixé sur Evan. Doucement, l'alcool semblait faire moins d'effet. Semblait seulement, soyons clair, il avait bien trop bu pour dé-saouler si vite. Mais être concentré sur une seule chose - personne en l’occurrence - ça évitait à son cerveau de trop se perdre. De trop filer ailleurs, et surtout de le laisser couler dans l'angoisse. On boit moins, de l'eau, on a dit, n'est-ce pas ? Pourtant quand le brun lui tendit le dernier shot - non sans en avoir avalé deux lui-même - il le vida aussitôt. Oui ben quand on est pas sobre, les choix s'imposent parfois d'eux-mêmes...

Et puis ces trois mots - voilà qui était parfait. Il avait dit : on y va. Sourire en coin, regard brillant. Leo, plus par naturel qu'à cause de l'alcool, passa un bras autour de la taille d'Evan tout en attrapant sa veste. Et... direction la porte.

Dehors, un coup de vent frais malgré ce mois de juin tira un frisson au blond, qui autant par réflexe que parce que ça l'arrangeait bien, tira un peu plus Evan contre lui.

- Hé bien. J'voudrais pas que tu attrapes froid.

D'un geste vague de la main, Leo appela à eux une voiture noire dont le moteur tournait déjà. Les vitres tintées ne permettaient pas de voir à l'intérieur. En ouvrant la portière pour le jeune homme, Leo étira un sourire satisfait, de celui qui sait qu'il est impressionnant... Même si ce n'était qu'une voiture, et qu'il avait en fait l'air plutôt stupide à se pâmer comme ça.

- Le carrosse de monsieur est avancé !

En découpant la scène au ralentit, voilà un peu ce qui venait de se passer dans la tête de Leo.

La voiture s'était avancée comme demandé. Il avait ouvert. L'odeur du cuir neuf et du cèdre était arrivée à lui. Il avait regardé les sièges. Avait entendu le trait d'humour d'Evan. Avait oublié de réfléchir.

C'était comme si une flamme, ou un courant électrique l'avait secoué. Et il fallait bien comprendre une chose. Leo, tout gentleman qu'il était, n'avait pas besoin d'être cherché longtemps pour être trouvé. Pas besoin d'être cherché, tout court. Rajoutez à ça un peu beaucoup trop de shots. Un charme ténébreux. Pas de témoins pour l'embêter. (Non le chauffeur ça compte pas) Et ça donne un Leo qui brainfreeze...

Il avait encore joué, le gamin. Gamin qui n'avait pas peur de suivre un inconnu, gamin qui n'avait pas sa langue dans sa poche, gamin qui se faisait - un peu violemment - plaquer contre la carrosserie du véhicule. Un regard, embrasé. Qu'est-ce qui lui prenait d'un seul coup, au blond ? C'était pas prémédité, pas vraiment. Pas réfléchi pour un sous. Et il était loin d'avoir demandé la permission, quand les doigts de sa main gauche - qui avait laissé tombé son manteau au sol - se refermèrent sur la mâchoire du brun, et qu'il vint presser ses lèvres contre les siennes. Sauvage. Féroce. Avide.

On avait dit, doux et galant ? Oupsy. Fallait pas être autant à croquer.

Note à lui même : il allait regretter ça en dégrisant. Ou pas ? Ou pas. Clairement pas, en fait. Leo, pour peu qu'il se souvienne de tout ça, il voudrait surtout recommencer.